Journal Liberté - dimanche 20 janvier 1974

Voilà une bien belle exposition : celle des œuvres du peintre tunisien Amor, à la Galerie de l'Oranger, fort bien présentées par Mme Ducreu.
L'art de ce peintre prend sa racine dans l'esthétique islamique ou (plus exactement) maghrébine. Certaines de ces toiles font penser à des panneaux de la salle des Abencerages de l'Alhambra de Grenade. Toutes, en tout cas, sont conçues sur un canevas de carrelages, où la monotonie de cette répétition géométrique s'oublie devant la richesse d'invention ornant chaque compartiment. Il n'en est pas deux de semblables ! Tantôt, ce sont des arabesques (ah ! que ce mot convient ici !) chorégraphiques sur un " pas de deux " ; tantôt des visages à peine figuratifs, ou des motifs quasi calligraphiques. Des rouges ardents, des bleus de lapis lazuki, des verts émeraudes, des noirs profonds…Ce sont à peine des tableaux, ce sont comme des tapis. Un art avant tout mural. Que l'artiste, qui vit à Paris, connaisse bien notre art abstrait contemporain (Bissières, probablement : ça ne fait pas de doute), mais qu'il soit resté fidèle à un long passé islamique, ce n'est pas non plus douteux. Un art sincère né, comme il y a près de mille ans, de la rencontre de deux civilisations.
L'exposition Amor, à la Galerie de l'Oranger (entrée maintenant rue Ste-Catherine) est, à notre avis, la première d'une telle qualité dans ce local maintenant parfaitement aménagé.

   
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